
Assemblée de Kayoux : chronique d’un participant
Ceci est le récit d’un participant à notre assemblée ouverte du 30 septembre, qui était un atelier sur les modes de décision. Vous pouvez en trouver un compte-rendu plus formel par ici.
Ottignies – LLN, 30 septembre 2018
Des vélos sont posés pêle-mêle à l’entrée de la salle et une grande affiche colorée annonce l’évènement du jour. La première assemblée citoyenne de la commune d’Ottignies – Louvain-la-Neuve aura lieu ici même dans quelques minutes.
A peine ai-je franchi le seuil du bâtiment que l’on m’interpelle amicalement. « Tu n’aurais pas un appareil photo ? On doit absolument faire une photo de groupe avec nos candidats porte-parole ». Ici, il n’est en effet pas question de tête de liste, les élu.e.s portent la voix des citoyens. Une douce et sympathique confusion règne alors que les participants arrivent peu à peu. De grandes tables rondes ont été disposées. Les organisateurs arborant les couleurs du collectif s’affairent aux derniers préparatifs. La salle se remplit, plusieurs dizaines de personnes ont maintenant pris place autour des tables. Enfin, le facilitateur prend la parole pour exposer non pas le programme de l’après-midi mais la méthode qu’il propose et les quelques principes de base qu’il nous invite à respecter pour servir un seul objectif, que la parole de chaque citoyen présent puisse être exprimée et écoutée dans les meilleures conditions, avec respect, non-jugement et bienveillance. Un facilitateur par table y veillera. Qui que nous soyons, étudiants, pensionnés, actifs, allocataires, urbains, ruraux, notre voix doit pouvoir porter de la même manière, avec la même valeur. Le coeur de la démarche du collectif Kayoux qui sera proposé aux élections communales est là. Donner de nombreuses occasions aux habitants d’Ottignies – Louvain-la-Neuve durant la prochaine législature d’exprimer leurs points de vue, de proposer des solutions et de décider. C’est assez simple et à la fois en total rupture avec l’organisation politique que nous connaissons.

La méthode, ce sont des temps d’expression individuelle et collective, de délibération, de vote, sur des mesures concrètes proposées par l’assemblée. Pas de grands discours ici, le facilitateur termine son introduction en invitant les participants à proposer des mesures au sujet d’une thématique d’actualité : la consommation de CO2 à l’échelle de la commune. Comment arriver à l’infléchir ? Quelques chiffres : le logement, la mobilité et le secteur tertiaire se partagent à parts égales 90 % du rejet de CO2. Un participant, réjouit, notera également que seul 1 % des rejets sont causés par les activités agricoles de la commune. Les modalités de délibération sont novatrices pour la plupart d’entre nous. Des temps de 30 minutes de réflexion et d’échanges sont entrecoupés par des moments de vote au sein de la table ou collectivement en assemblée. Des outils aident à y voir plus clair, l’information et les points de vue individuels et collectifs circulent et ainsi au fil de l’après-midi, des propositions concrètes se dégagent, sont débattues et soumises plusieurs fois au vote. Je sens que la démocratie s’ébranle, revit, se dynamise.

16h45, déjà l’heure de conclure. Alors que le dernier porte-parole appose une gommette verte au regard de la proposition choisie par les membres de son groupe, une question s’élève dans l’assemblée. « Mais quel sera le rôle des élu.e.s de la liste Kayoux ? Et bien, répond un kayoux, c’est exactement ce que vient de faire le porte-parole au tableau. Coller la vignette et donc porter la voix des citoyens ».
Je quitte l’assemblée avec l’impression qu’ici, nous avons fait une expérience de délibération concrète et respectueuse du point de vue de chacun sans a priori idéologique qui ne demande qu’à être reproduite et surtout à essaimer un peu partout dans les communes. J’ai ressenti que toutes et tous nous avons contribué aujourd’hui à faire advenir une intelligence collective qui est devenue indispensable à la gestion du bien commun. Le filtre du politique a vieilli, il est désuet et peu efficace, il ne peut plus répondre aux questions cruciales et extrêmement urgentes qui se posent à notre civilisation. Le collectif Kayoux a démontré à travers cette première assemblée citoyenne locale et expérimentale qu’avec beaucoup d’humilité, de respect et de bienveillance, il est possible de délibérer intelligemment sur des sujets politiques essentiels. Des questions d’organisation sont encore à débattre bien sûr notamment sur la méthode la plus adaptée pour que la délibération citoyenne représente le plus fidèlement possible les points de vue individuels. Sur ce point, le message des kayoux est sans équivoque : voir loin, commencer petit ! Ce n’est pas un programme mais un état d’esprit et cela fait toute la différence.
Pascal Warnier, participant sympathisant